Ai fau piaire ai Dieu et au Diâle / Il faut plaire à Dieu et au Diable
Ai Dijon j'aitô sanmedi,; J'étais samedi à DijonMa, dan l'aipré meïdi, Mais, dans l'après-midiN'aivan pu ran ai fâre , N'ayant plus rien à faireOu viray? Je n'saivô gâre; Où aller? Je ne savais guèreY me sé parmenai Je me suis promenéEin p'cheu, po çi po lai. Un peu par ci, par là.Y antre dan eine Edîse; J'entre dans une EgliseY n'fasô pa d'seutise, Je ne faisais pas de sottiseJ'alô teu doceman, J'allais tout doucementDu lon dé cheîre et peu dé ban, Le long des chaises et puis des bancsTeu t'ébôbi de voi lé vitre Tout étonné de voir les vitrauxDu coeu vou du chaipitre. Du coeur ou du chapitreQuan t'érivai devan l'aôtel Quand, arrivé devant l'autelDe l'arkainge Michel, De l'archange MichelY voi le Sain perçay le Diâle Je vois le Saint percer le DiableQue de quelère aitô teu pâle; Qui de colère était tout pâleEt peu, dan ce moman, Et puis, à ce moment làSan treu saivoi queman, Sans trop savoir commentY trévoi, potan deu gran cierge, J'aperçois, portant deux grands ciergesEine fanne aibillée en vierge... Une femme habillée en Vierge...Tandi qui me pansô: Tandis que je me pensaisLai Sainte pote bé son bô; La Sainte porte bien son boisQu'èle a don récossée, Qu'elle est donc pimpanteEt suteü révoillée, Et surtout réveilléeBiainche lai main, lé pié peti, Blanche la main , les pieds petitsSu l'devan d'biâ titi; Sur le devant de beaux tétonsY me disô: Que çâ deumaige Je me disais: que c'est dommageQu'èle n'ô pa gotay du mairiaige; Qu'elle n'ait pas goûté au mariagePor ein mairi qué bel odon Pour un mari quelle belle besogneDe modre en si frian gaülon! De mordre dans une telle friandise!Et lai dessu, v'lai mai bèle Et là dessus, voilà ma belleQue peüse eine chandèle Qui pose une chandelleVi z'ai vi d'sain Michay Vis à vis de Saint MichelEt peu l'aôtre, ai cotay, Et puis l'autre, à côtéDevant l'Diâle. Qué méprise! Devant le Diable, Quelle mérpise!
Di le Baideü, dan l'Edîse, Dit le Bedeau, dans l'EgliseCâ fâre ein vrai péché motel C'est faire un vrai péché mortelQue d'étiairay l'Diâle su l'aôtel. Que d'éclairer le Diable sur l'autel.-Ma, Mossieu, çâ bé râre, - Mais, Monsieur, c'est bien rareQu'èle répon, Qu'elle répondQu'an voî du moime eïl eine aifâre; Qu'on voie du même oeil une affaireChécun regade ai sai faiçon. Chacun regarde à sa façonTeu t'en fasan sai repantance, Tout en faisant sa repentanceAi fau fâre dé queuneussance Il faut faire des connaissancesDan teu lé carenaü, Dans tous les coinsAu Pairaidi, ma dan l'Anfar suteü. Au Paradis, mais dans l'Enfer surtoutAi teu lé queü l'an gaingne A tous les coups l'on gagnequan t'an sai, di mai voisaigne, Quand on sait, dit ma voisineTiray son épindie du jeü, Tirer son épingle du jeuEn fiaitan lai cheîvre et le cheü. En flattant la chèvre et le chouV'lai po quoi, moi qu'vo pale, Voilà pourquoi, moi qui vous parleJ'étiaire l'ainge et peu l'Diâle, J'éclaire l'ange et puis le DiableCar en c'monde nûn ne say Car en ce monde personne ne saitVâ qu'an peu se treuvay. Où qu'on peut se trouver.-Ma d'qué pairoisse vo z'éte? -Mais de quelle paroisse vous êtes?Que le baideü ly di: Que le Bedeau lui dit:- De Notre Dame de Lorète. - De Notre Dame de Lorette.J'an sé restai teu t'ébôbi, J'en suis resté tout ébahiEt por aiprè j'en ai bé ri; Et puis après j'en ai bien ri;De lai faiçon qui peu vo dire De la façon que je peux vous direQue cète léjande a po rire. Que cette légende est pour rire.
Extrait de Contes, fables et légendes en idiome bourguignon du Dr H. Berthaut, par Jean-Luc Carmoi, Fontaine-lès-Dijon.
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