Les Francs-Cacous

 

 

 

De la farine, des oufs, du sucre en poudre, du lait, un peu de sel, et bien sûr des cerises noires non dénoyautées, on obtient le cacou .

En 1347-1348, la peste noire frappe toute l'Europe et à Paray-le-Monial tous en moururent sauf deux, Lucas Coup et son épouse Glaudine.

Restés seuls, Lucas et Glaudine comprirent qu'il leur appartenait de repeupler le pays : ils avaient vingt ans, une extraordinaire vitalité, et du courage à revendre. Ils ne rechignèrent pas à la tâche et, pendant des années, nouveaux Adam et Eve, ils repeuplèrent la contrée.

Ce fut un exploit. On en parla un peu partout. Tant et si bien que la chose vint aux oreilles du roir de France Charles VI, et demanda des renseignements à son cousin le duc de Bourgogne Jean sans Peur. Celui-ci, pris par d'autres obligations, chargea le grand bailli d'aller à Paris expliquer au souverain ce qu'il en était. Et Charles VI apprit ainsi tous les détails de ce que l'on appelait le cas Coup . Il décida que, désormais, tous les Parodiens seraient des cacous. Le fils aïné de Lucas et de Glaudine, Jean-Marie, fut ainsi le premier des cacous. Par un curieux transfert, c'est lui et non son père qui actuellement est considérée comme le fondateur de la lignée, et tous les Parodiens se considèrent comme sortis de ses reins.

Ce Jean-Marie possédait beaucoup de qualités, il réalisa de belles et bonnes choses. Mais la principale, ce fut encore la création d'un gâteau aux cerises.

La région de Paray était à l'époque terre d'élection des cerisiers, et les enfants et petits-enfants de Lucas Coup prisaient fort les fruits de ces arbres. Jean-Marie, lui, préférait le gâteau qu'il confectionnait lui-même avec des cerises, non dénoyautées pour conserver au fruit toute sa saveur.

Sa recette se répandit, tous les Parodiens mangèrent et apprécièrent ce gâteau, vite appelé du nom de cacou .

Ce gâteau était un peu sec, il fallait lui trouver un breuvage qui permît de le faire passer. Mais que boire à Paray ? L'eau de la Bourbince  ? Celle de la Loire toute proche, à trois lieues à peine ? Trop fade.

Jean-Marie décida d'aller chercher plus loin une boisson adéquate. Non pas du côté de l'ouest vers la Loire , mais du côté de l'est vers Cluny. Il partit donc un matin, son bâton à la main, dans la direction où le soleil se lève.

A Cluny, il apprit que les moines avaient, depuis longtemps, planté la vigne sur les coteaux, et qu'ils récoltaient un vin agréable à boire, tant en rouge qu'en blanc.

Jean-Marie poussa encore un peu plus loin. Il franchit une chaîne de collines et arriva, un jour, près de la Saône , dans un village du nom de Viré dont les habitants, des vignerons, lui parurent bien sympathiques. Ils lui firent la fête et lui donnèrent à goûter du vin blanc de leur vigne. Il en but et l'apprécia fort : c'était exactement ce qu'il lui fallait pour accompagner son gâteau.

On lui en offrit trois bouteilles, qu'il emportat dans sa besace.

Et voilà pourquoi, chaque année en mai, il y a à Paray une grande fête populaire au cours de laquelle on s'en donne à cour joie et organise un chapitre avec adoubement et intronisations.

 

Extrait de Contes et Légendes de Bourgogne , Henri Nicolas.

 

 

 

 

 


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